« Pour moi, la liberté c’est ne pas avoir à me battre avec qui que ce soit pour quoi que ce soit parce que je suis une femme. » -  Wiyaala (Ghana) 4/4

SOURCE PHOTO : WIYAALA.COM

C’est la dernière partie de notre entretien avec Wiyaala, la lionne de l’Afrique est originaire de Funsi dans la région du Haut Ghana occidental. Icône mondiale, elle se distingue par son timbre de voix particulier, son style unique et son engagement pour aider les filles de sa communauté à réaliser leurs rêves.

Au cours de notre conversation, elle nous a parlé de son enfance et de ses premières influences (Partie 1), et de son parcours en tant qu'artiste, notamment de ses choix audacieux concernant sa musique et son personnage sur scène (Partie 2). Elle parle également du féminisme et du travail qu'elle accomplit pour lutter contre le mariage des enfants et soutenir les filles et les femmes de sa communauté (Partie 3). Dans cette quatrième partie, Wiyaala nous fait part de ses réflexions sur la vie, la liberté et l'impact qu'elle exerce.

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Tu œuvres dans le domaine de la justice sociale, et l'un des sujets qui ressort le plus est celui des mariages d'enfants. Qu'est-ce qui t’as incitée à faire du mariage des enfants l'une des causes que tu défends à travers ta plateforme, ta musique et tes messages ?

J'ai vu des mariages d'enfants à de nombreuses reprises dans ma communauté et dans différentes régions d'Afrique. Et en tant que femme africaine, lorsque tu sors de chez toi, parfois – peut-être même tout le temps – tu es comme une galerie ambulante de tous les problèmes et de toutes les choses qui se sont produites. Beaucoup de gens se demandent probablement si toi aussi, tu y es passée. Tu es dès lors automatiquement transformée en porte-parole. Je pense qu'il y a tant de jeunes filles qui ont probablement encore plus de talent que moi. J'ai eu la chance d'avoir des opportunités qu'elles n'ont peut-être pas eues. Donc, si je me trouve en position de donner un coup de main à une sœur, à une fille, pour lui rendre la vie meilleure, je le ferai.

Dans ma communauté, je ne suis pas la seule fille à savoir chanter. Je suis certaine qu'il y a d'autres filles, mais elles ne le savent probablement pas parce qu'il n'y a pas de plateforme. Personne ne revient dans cette communauté pour leur donner la parole. Tout se fait ailleurs, peut-être dans les grandes villes. J'avais l'habitude de regarder la télévision dans le village, et ils diffusaient des émissions pour enfants. Un jour, j'ai demandé à ma mère quand ils viendraient dans mon village pour présenter l'émission, afin que nous puissions également nous produire. Ma mère s'est mise à rire. Je comprends maintenant pourquoi elle riait. La route qui mène à mon village n'est pas très bonne. Personne ne connaît Funsi. Même quand je suis devenue très célèbre au Ghana, les gens ne savaient pas où se trouvait Funsi jusqu'à ce que je commence à chanter.

Et en quoi consiste le fait de donner un coup de main pour toi ?

Quand je pense à toutes les filles qui n'ont pas eu leur chance, je fais ce que je peux pour leur créer des opportunités.

Lorsque j'étais enfant, j'ai vu presque tous les jours du marché des filles y être emmenées pour être mariées. Un jour, ça a dû être le tour de quelqu'un qui n'habitait pas loin, et on m'a appelée pour voir si je pouvais aider, ce que j'ai fait. Puis j'ai décidé que puisque personne ne venait dans ma communauté et qu'aucun d'entre nous n'avait pu faire quelque chose, j'allais créer cette plateforme que je voulais quand j'étais enfant et que je n'ai pas eue. Nous sommes tous.tes concerné.e.s, mais nous ne pouvons pas tous.tes être à des endroits différents en même temps. Alors, quel que soit l'endroit où je me trouve, je dois peut-être apporter ma petite contribution.  

J'ai donc décidé de créer ces plateformes, en commençant par un centre d'art dans la communauté pour encourager les filles à monter sur scène. J'ai créé une plateforme et nous avons des concours de beauté. Nous organisons des concours de danse. Nous avons un club de théâtre pour encourager les jeunes filles en particulier, mais aussi les garçons, à utiliser ce moyen pour prendre confiance en eux, montrer leur talent à leurs parents, au monde entier, se voir faire et voir les mots d'encouragement qu'ils reçoivent du monde entier. Je pense que cela changera beaucoup de choses que certains d'entre eux ne connaissaient pas. Si j'avais eu cette plateforme enfant, Dieu seul le sait, j'aurais pleuré. C'est ainsi que j'ai commencé à m'impliquer dans la communauté et à défendre la cause des petites filles.

As-tu constaté des changements dans ta communauté, notamment en ce qui concerne le mariage des enfants et sa prévalence ?

Pour moi, l'impact a été considérable. Je l'ai constaté depuis que nous avons créé le Club des filles. En réalité, je n’ai pas créé ce groupe. Lorsque j'ai commencé à rentrer chez moi, un jour, environ sept filles âgées de onze à treize ans sont venues chez moi et m'ont dit : « Grande sœur Wiyaala, nous sommes aussi des danseuses. Nous aimerions que tu sois notre cheffe et que tu nous apprennes à danser. Et quand tu donneras tes spectacles, nous voudrions venir danser pour toi. »

J'ai accepté, et à chaque fois que nous dansions, elles voulaient danser davantage. Nous avons donc créé le Club des filles. Il n'y avait que des filles, et nous avons commencé à nous produire chaque fois que nous le pouvions. Leurs parents étaient contents, et d'autres parents disaient : « mais ma fille sait danser aussi, il faut qu'elle s'inscrive ». Lors de l'une de nos représentations, nous avons eu une discussion avec l'ensemble de la communauté. J'ai donné mon exemple et j'ai expliqué que tous mes talents auraient été cachés si mes parents m'avaient mariée.  Je les ai mis au défi de réfléchir au nombre de rêves de jeunes filles qu'ils ont tués en les mariant. Je les ai encouragés à permettre aux filles d'aller à l'école et d'acquérir des connaissances, afin qu'elles sachent quoi faire en grandissant. Elles auront suffisamment de connaissances pour faire des choix judicieux.  

Cela a-t-il changé quelque chose ?

Le club a changé beaucoup de choses, car je leur ai également dit que leurs enfants devaient être inscrites à l'école pour rejoindre le club. Tous les enfants sont donc retournées à l'école. Certaines sont devenus enseignantes, d'autres vont devenir infirmières, et c'est incroyable. Je n'ai même pas participé financièrement. Certains parents ont vu ce que je faisais, et ils pensent que leurs filles comptent autant que leurs fils. Ils nous ont même demandé d'inclure les garçons, et nous appelons maintenant le groupe "Club des filles et des garçons".  Et c'est vraiment bien, car si vous enseignez aux filles, les garçons devraient aussi se joindre à vous pour que nous nous enseignions mutuellement et que nous changions la mentalité selon laquelle les filles doivent faire des choses parce qu'elles sont des filles, et les garçons parce qu'ils sont des garçons. Nous apprenons comment nous pouvons tous grandir dans une communauté et nous respecter les un.e.s les autres. Nous avons aussi des gens qui viennent toujours nous conseiller et faire des dons pour encourager les enfants, ce qui les pousse à devenir encore plus sérieux. Voilà l'impact pour moi.

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C'est très inspirant. Je sais que tu as abordé la question de la marchandisation du corps des musiciennes et des délais dans lesquels elles s'épanouissent. Tu fais de l'art et tu t’exprimes et parfois les gens décrivent cela comme une provocation pour une femme de ton milieu culturel. Quelle est ta réaction habituelle face à cela ? Et comment réagis-tu à certains de ces commentaires ?

J'accepte les critiques, car avant même de publier une vidéo, je sais qu'elle ne plaira pas à tout le monde. Les gens me disent toujours : « Oh, tu exposes ton corps, tu danses de manière trop sexuelle », etc. J'en suis consciente et c'est mon art. Cela fait partie de mon art. Mes mouvements de danse, mon habillement. Ce que certains considèrent comme l'exposition de mon corps a déjà été fait auparavant. Je ne suis pas la première à le faire. C'est ainsi que je présente mon art. Lorsque je ne suis pas sur scène, je porte mes vêtements habituels. Mais lorsque je monte sur scène pour présenter ma musique et mon art, qui sont liés à ma culture africaine, tous mes costumes s'inspirent des danseurs traditionnels. J'améliore le costume traditionnel pour l'adapter à mon art et à mon corps, car mon corps est différent de celui de n'importe qui d'autre. Alors, quand les gens disent que je m'expose, que mon habillement n'est pas bon, ce sont des hypocrites. Et je refuse d'être d'accord avec eux lorsqu'ils disent que c'est vulgaire.

Nous avons des mouvements sexy et traditionnels, nous avons des chansons sexy traditionnelles que nous chantons si bien. J'apporte la même chose sur la plateforme et je chante notre culture. Alors parfois, je ne me laisse pas impressionner. C'est de l'art, et l'art peut être fou. Je prie toujours pour que tout le monde voie le bon côté des choses, mais en fin de compte, je me suis préparée à ne pas être en colère parce que tout le monde n'est pas toujours d'accord avec vous. Je me concentre sur les personnes qui voient l'art pour ce qu'il est, et j'y consacre mon énergie. Je n'ai pas de temps pour la négativité, car elle me ramène en arrière et c'est un endroit où je ne veux pas aller. J'ai verrouillé cette porte. [Rires]

[Rires] C’était intéressant d'apprendre que tu concevais et cousais tes propres tenues de scène. Comment te sens-tu, en utilisant tes mains et tes nombreux talents pour créer exactement ce que tu veux et te présenter de cette manière ?

Chaque fois que je crée un costume et que je vais choisir le tissu, j'ai le cœur qui bat la chamade. Je vois le motif dans ma tête, la couleur que je veux et la façon dont il va tenir sur mon corps. Je veux toujours que tout le monde sache que j’ai décidé, par défaut, de créer mes propres costumes. Au départ, je ne pouvais pas faire de robe. Enfin, peut-être que je pouvais, mais je ne savais pas. À l'époque, j'allais chez un tailleur ou une couturière et ils savaient que je n'avais pas d'argent, alors ils me faisaient faire des allers-retours. Je ne pouvais m'offrir que le matériel et je leur demandais de m'aider à confectionner les costumes. S'ils étaient d'accord et que je leur faisais part de ce que je voulais, ils refusaient parce qu'ils pensaient que je n'avais pas d'argent et que je ne pouvais donc pas leur demander de me faire des robes courtes.  Ils faisaient simplement la robe qu'ils voulaient et me disaient de la prendre. Je l'emportais alors chez moi et la découpais selon mes désirs. Mais lorsque le tailleur voyait que j'avais coupé la robe, il se mettait en colère. Cela s'est produit deux fois, et j'ai alors réalisé que je n'obtiendrais pas les costumes que je voulais dans les magasins. J'ai donc décidé de fabriquer mes propres costumes. Pour les premiers, j'ai vraiment détruit le tissu. Je l'ai porté ; il était très voyant, mais il m'a permis de me démarquer immédiatement. Certaines personnes l'insultaient et j'ai dû continuer à m'expliquer jusqu'à ce que je dise : « Vous savez quoi ? Je ne vais pas m'expliquer avec qui que ce soit. Si vous ne l'aimez pas, c'est votre problème ».

J'ai continué à le faire et à m'améliorer. Aujourd'hui, j'ai une idée très claire de ce que je veux et je connais mon type de corps, alors je crée ce qui me convient. Aujourd'hui, j'utilise davantage les costumes traditionnels parce qu'ils permettent vraiment de faire coïncider le sens de la danse et la musique. C'est comme si la musique parlait à la robe et que la robe parlait aussi à la musique, et c'est le pouvoir de la musique africaine. Je crée en fonction de la danse. Je fais beaucoup de danses africaines différentes et je danse beaucoup avec mes jambes. Je ne peux donc pas porter quelque chose qui m’empêcherait de bouger les jambes et de sauter. C'est ainsi que je crée mes costumes et j'aime le faire.

C'est génial ! Je sais que tu choisis délibérément d'honorer les traditions et la culture africaines – notamment ta propre culture et tes propres traditions – tout en t’opposant à certaines choses comme les mariages précoces, que les gens considèrent comme faisant partie de notre culture depuis longtemps. Comment trouves-tu un équilibre entre ces deux aspects manifestement importants pour toi ?

Je peux le faire, d'abord avec l'aide des médias sociaux, puis avec les messages de mes chansons. Oui, c'est l'Afrique, et c'est ce que nous sommes. Mais le monde a évolué et nous aussi. Oui, nous sommes instruit.e.s, mais cela ne veut pas dire que je vais me débarrasser de mes vêtements traditionnels et ne porter que des costumes. L'Afrique a changé. Nous avons nos problèmes, mais je vais aussi montrer le côté positif de l'Afrique parce que le côté négatif est montré presque tous les jours. Il y a de grand.e.s Africain .e.s qui réalisent de grandes choses ; il y a de belles villes et de beaux pays en Afrique.

Il y a des problèmes que je n'attends pas que quelqu'un vienne m'aider à résoudre parce que je sais que je peux les résoudre moi-même. Chaque fois que j'ai l'occasion de résoudre un problème, je le fais. Ainsi, le reste du monde sait que nous pouvons faire ce que nous voulons. Nous ne sommes pas parfaits, comme n'importe quel autre continent, mais il ne faut pas projeter uniquement nos mauvais côtés. Cette image nous hantera de différentes manières. Je ne permettrai donc pas que cela se produise. Mais en même temps, je fais de mon mieux pour garder les pieds sur terre parce que je viens d'un foyer qui sera gêné ou un peu triste si je fais des choses inappropriées. Le fait de rester dans ma communauté m'a également permis de garder les pieds sur terre, de toujours me rappeler d'où je viens, la chance que j'ai d'être là où je suis et le fait que je ne dois pas gâcher cette opportunité. Pour certains d'entre nous, des occasions comme celle-ci ne se présentent que rarement.

Ainsi, le fait de garder les pieds sur terre m'a vraiment aidée à équilibrer tout cela. Je suis un être humain et je ne suis pas parfaite, mais je fais de mon mieux. Ce n'est pas facile. C'est pourquoi j'ai hâte de pouvoir encadrer un.e ou plusieurs chanteur.euse.s, afin qu'il.elle.s prennent en charge une partie du travail. Je ne peux pas le faire seule. Je dois impliquer davantage de jeunes femmes et même de jeunes hommes pour qu'ils me rejoignent dans la diffusion de ces messages. J'espère et je prie pour trouver la force et l'énergie de faire tout cela avant d’être rappelée par le Seigneur un jour. (Rires)

Nous espérons qu’encore beaucoup d’années s’écouleront avant ça. Tu as abordé un sujet très important, à savoir l'aide aux autres jeunes, et j'avais une question concernant ton lien avec ta communauté. Nous avons vu des vidéos de toi marchant le matin pour aller chercher ton Waakye[1] et l'apprécier. Comment ta communauté t’a-t-elle soutenu avec ta musique et les causes que tu défends ?

Le soutien que je reçois de la communauté est solide depuis trois ou quatre ans. Ce n'était pas le cas lorsque je suis rentrée chez moi. Les membres de ma communauté n'étaient pas prêts à croire que j'étais revenue chez moi et que je me mêlais encore à eux. Ils disaient des choses comme : « Tu es allé sur la terre de l'homme blanc. Tu es allée au paradis et tu reviens dans cet enfer. Cette fille n'est pas sérieuse ». Lorsque j'ai commencé avec les filles qui dansaient, certains parents n'étaient pas très contents. Ils pensaient que j'avais échoué et que j'étais venu utiliser les enfants du village à mon propre profit. Ils voulaient me voir vivre la "belle vie" en Europe, pour croire qu'eux aussi pouvaient y aller. Mon retour n’avait rien d’inspirant pour eux.

J'ai décidé de ne rien dire. Tout comme mon nom[2], celui qui agit sait ce qu'il fait. J'ai rejoint mes sœurs et nous avons démarré notre propre projet. Nous avons rénové de vieux bâtiments nous-mêmes et, au bout de quelques mois, les gens ont commencé à voir quelque chose. Ils se sont dit : « Attendez un peu. Nous pensons que cette fille fait quelque chose de bien. Nous ne devrions pas être comme ça. Aidons-la. » Lorsque nous avons construit le centre d'art et que je leur ai expliqué à quoi il servait, ils ont reconnu que nous n'avions même pas d'endroit où nous réunir pour nous divertir. Ils sont donc venus et ont travaillé gratuitement. Les femmes allaient chercher l'eau et les hommes construisaient. Tout a changé.

Maintenant, si j'ai un programme avec les enfants, j'ai toujours de jeunes garçons qui viennent me demander : « De quoi avez-vous besoin ? » Et avant qu'ils ne s'en rendent compte, des gens venaient de différentes parties du monde à Funsi pour voir les enfants jouer. Funsi est désormais sur la carte. C'est simplement quelque chose que nous avons décidé de faire ensemble. Je peux dire en toute confiance que les habitants de Funsi nous ont beaucoup soutenues. Le Ghana nous a beaucoup soutenues. Et les choses se passent bien. Les membres de ma communauté me soutiennent et me protègent. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, il vous suffit de le dire et ils sont là pour vous aider. Ils ont vu les résultats de l'impact que nous avons sur la communauté. C'est donc devenu positif.

Je suis ravie que les réactions aient pris une direction positive. Lors d'une précédente interview, tu as déclaré : « Je veux mettre en avant la liberté d'être libre, de faire des choses en tant que jeune femme ». Cela m'a interpellée, car mon féminisme est axé sur la liberté, la libération. Il s'agit de pouvoir faire ce que je veux et de réaliser mes rêves sans les limites qui m'entourent, simplement parce que je suis une femme. À quoi ressemble la liberté pour toi ?

Oh, wow ! Pour moi, la liberté c'est... avant tout, je suis heureuse. Je suis à l'aise et confiante. Je n'ai pas à me battre avec qui que ce soit pour quoi que ce soit parce que je suis une femme. Les ressources me sont accessibles, je peux les exploiter sans être remise en question juste parce que je suis une femme. On m’écoute et on me prend très au sérieux, parce que j'ai aussi de bonnes idées. Et les gens sont prêts à me soutenir parce qu'ils savent que j'ai du talent, et pas seulement parce que je suis une femme.

Je devrais pouvoir dire ce que je pense en toute confiance sans que quelqu'un vienne me dire : « Tu es une femme, tu n'as pas le droit de dire ça ». Mais surtout, tout ce qu'un homme peut faire, je le ferai aussi sans être jugée. Je dis toujours que les hommes et les femmes sont différents. Il y a certaines choses que l'un peut faire et que l'autre ne peut pas faire, et c'est dû à la façon dont nous sommes né.e.s... à la nature. On ne peut pas lutter contre la main de Dieu. Mais en fin de compte, nous sommes tous.tes des personnes et nous devrions être libres, avoir des chances égales et pouvoir essayer.

La liberté, c'est tout ce que j'ai mentionné : le bonheur, la liberté de penser, la liberté de parler, la liberté de choisir qui je veux épouser, la liberté d'avoir un enfant quand je le voudrais... la liberté. La liberté signifie également que je dois prendre mes responsabilités et faire des choses que j’estime positive.

Et si tu avais toute la liberté du monde aujourd'hui, que vous ferais-tu ?

[Rires] Je ne sais même pas ce que je ferais si j'avais toute la liberté du monde. Je répandrais autant d'amour que possible. L'amour apportera la paix, la joie et le travail. Il mettra fin aux égos, aux mépris et aux guerres. Quand il y a de l'amour, tout le monde est calme. Avec l'amour, on dit que tout est possible. Tout le monde fera quelque chose de positif. Je répandrai beaucoup d'amour.

C'est beau. Et cela me rappelle que tu as dit que tu aimais les motos. Parle-nous un peu plus de cet amour.

J'ai grandi en conduisant des motos et en faisant des courses. Je pense que l'une des premières choses que beaucoup de jeunes – hommes et femmes – utilisent dans ma région est une moto. Tout le monde roule, et vous n'avez même pas besoin d'un professeur. On apprend à le faire tout.e seul.e. Beaucoup d'entre nous commencent à rouler avant même d'avoir le permis. C'est pourquoi certains d'entre nous aiment vraiment les motos. En fait, nous adorons les motos. Elles sont numéro un, avant même les voitures.

Dans ma communauté, si tu veux vraiment impressionner quelqu'un, tu lui offres une moto et tu vois la joie sur son visage. Nos routes sont telles qu'une moto est plus rapide qu'une voiture, alors tout le monde aime ça. J'ai un autre niveau d'amour pour les motos, parce que lorsque tu conduis une moto, c'est comme si tu étais au sommet du monde. Tu es libre, tu voles et tu peux sentir l'air sur ton visage. Les motos me donnent ce sentiment de liberté. Je suis aux commandes et je vais où je veux.

C'est une très belle façon de conclure notre conversation, prendre la moto comme symbole de la liberté. Mais avant cela, je vais poser notre question finale à Eyala : Quelle est ta devise de vie féministe ?

Je dirais : « Osez être différent.e ». Et cela m'est venu des mots des gens. Ils me disaient : « Tu es tellement audacieuse et différente. Tu ne soucies pas de ce que les gens disent. Tu fais les choses d'une manière différente ». N'ayez pas peur d'être différent.e lorsque vous agissez. Ne demandez pas la permission. Souvent, c'est ce que nous faisons et nous sommes retenu.e.s. Contentez-vous de le faire. Quand on est différent.e, c'est bien. Alors, osez être différent.e. Allez-y.  Voilà qui je suis.

Merci beaucoup Wiyaala. J'ai vraiment apprécié cette conversation et j'espère que toi également. Y a-t-il quelque chose qui t’a traversé l’esprit lors de cet entretien et que tu t’es dit « J’en parlerai », mais que nos questions n'ont pas permis d'aborder ? C'est le moment de partager.

Qu'est-ce que je peux dire ? Je pense que j'ai presque tout dit. Oui, je sais que les gens veulent parfois savoir si je suis mariée ou non. C'est un autre aspect de ma liberté d'esprit et une question à laquelle je réponds toujours : « Quant à celle-là, je préfère garder la réponse privée ».

[Rires] Et c'est une question que nous ne posons délibérément pas. Nous sommes donc d'accord pour garder cette question privée.

Merci Jama !

Merci pour le travail que tu accomplis afin d'influencer des vies et de changer les communautés et les mentalités. Merci beaucoup, Wiyaala.

[1] Plat populaire composé de riz et de haricots cuits, vendu en bordure de route.

[2] Wiyaala signifie « celle qui agit ».

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